AUTOMEDICATION : UNE PRATIQUE ADOPTEE A SES RISQUES ET PERILS
Phénomène courant et en vogue, l’automédication est répandue à travers le monde. Officinale ou familiale, cette pratique existe depuis longtemps. Les remèdes miracles de grandes mères pour soigner des maladies bénignes ou des astuces santé maison qu’on l’oublie souvent mais qui sont aussi de l’automédication. Pour les acteurs de la santé, « s’automédiquer » est très dangereux et déconseillé.
L’organisation Mondiale de la Santé (OMS) définit l’automédication comme le traitement de certaines maladies par les patients grâce à des médicaments autorisés, accessibles sans ordonnance, sûrs et efficaces, dans les conditions d’utilisation indiquée. Cependant, selon des données publiées par l’OMS et relayées par le site d’information www.lemonde.fr, 10% des médicaments vendus dans le monde sont non conformes et la situation est encore plus accablante en Afrique où 30% à 70% des médicaments en circulation seraient des faux. Alors que, dans la pratique de l’automédication, les patients préfèrent se ruer vers les médicaments en vente libre ‘’désignés comme faux’’.
Plusieurs raisons poussent ceux qui s’automédiquent à le faire: « C’est un réflexe. Quand on a mal tout de suite c’est le premier réflexe, c’est tout. En tout cas me concernant c’est cela », a déclaré Thierry Gandaho, la quarantaine, fonctionnaire. « Moi je pratique l’automédication pour deux raisons. Primo, je n’aime pas perdre le temps pour aller trainer à l’hôpital surtout que dans nos hôpitaux ils sont lents et peu accueillants et secundo j’ai la possibilité d’aller acheter le médicament qui peut me guérir à la pharmacie ou chez les bonnes dames. Et puis, la première maladie qui secoue un africain c’est le palu. Et les antipaludéens, sont accessibles», Gloria Azonhè, commerçante. « Les moyens pour aller en consultation, payer l’ordonnance du médecin et bien d’autres font que je préfère me limiter aux médicaments de la rue et me soigner moi-même. Puisqu’avec les médicaments du Nigéria qui sont à un coût abordable par exemple, tu règles vite fait le problème », Zéphirin Akoha.
D’autres par contre se méfient de cette pratique par peur des effets secondaires : « Je ne prends jamais les médicaments sans avis médical. D’abord, ce n’est pas conseillé et je m’aime trop pour endommager ma santé », Priscille Mahouton. « J’évite l’automédication, parce que la dose que je dois prendre, la posologie, les prescriptions de tel ou tel médicament, je n’ai pas connaissance de ça. Et je pourrai facilement faire des surdoses et en voulant guérir un mal, je vais en créer un autre », Julie Zanvo. « Je me préserve beaucoup, je ne me donne pas trop à cela parce que il ne faut pas s’amuser avec sa santé», Paterne Amoussou.
S’ingurgiter des médicaments sans avis médical peut s’avérer très dangereux et causer des maux tels que l’aggravation de son mal, l’AVC, la paralysie, et même la mort.
Pour le docteur Henri Charles Aïnadou, pharmacien, l’automédication n’est pas une bonne chose parce que : « L’on peut se tromper de dose mais aussi de traitement puisque souvent pour l’automédication on prend le médicament pris par quelqu’un qui a eu le même mal mais on ne peut pas s’assurer que cette personne a les mêmes symptômes. Cela est valable aussi pour les médecins et pharmaciens. Ils doivent faire attention à se soigner eux-mêmes ou de soigner leur entourage sans recourir à un médecin car ça aussi c’est de l’automédication. »
Pour pallier à ce mal qu’est l’automédication, les officines ont mis en place des stratégies pour conseiller et éduquer les populations en leur posant des questions avant de leur servir. Mais pourtant, cela semble ne pas fonctionner car malgré l’existence des pharmacies et hôpitaux, les populations préféraient se tourner vers des pharmacies à ciel ouvert. La plus visitée au Bénin : ‘’Adjégounlè’’, était la préférée des pratiquants.
Automédication VS l’économie
Situé dans le plus grand marché de l’Afrique de l’ouest, ‘’Adjégounlè’’ était le nid même de l’automédication. Cette partie du marché remplie de commerçantes bien aguerries proposaient en son temps aux populations des médicaments conservés dans des conditions de stockage non adéquats et douteuses selon les spécialistes. Mais pour ces vendeurs et vendeuses, ce n’est pas le cas : « Quand le client exprime son mal, nous on comprend déjà et on le sert en même temps. En plus, il y a des médicaments qui n’existent même pas dans les pharmacies et les médecins les prescrivent. Mais nous on en a. Aussi, nos produits sont à un prix abordable et produisent les mêmes résultats. Les docteurs eux, ils demandent consultation chère d’abord, après envoient à la pharmacie et encore toutes les pharmacies ne sont pas équipées comme il le faut et n’ont pas tous les médicaments», a déclaré dame Olatoumbi, ancienne vendeuse de médicament à Adjégounlè.
Ce grand marché d’antan de vente de médicament contribuait et encourageait la pratique de l’automédication. Puisque même après consultation médicale, beaucoup préfèrent se rendre là-bas avec leurs ordonnances. Cet endroit raclé pour vente de faux médicaments contribuait d’une part fortement à l’économie du pays car selon des données publiées par l’Institut national de la statistique et de l’analyse économique (Insae), le marché des médicaments au Bénin pesait 55 milliards de Francs CFA (9 millions d’euros) pour les faux médicaments en 2004.
D’autre part, l’automédication connaît de l’ampleur grâce à la pauvreté que vit la majorité des populations des pays sous développés. Aussi, le marché des médicaments est évalué à 75 milliards de dollars (67,5 milliards d’euros) en 2016 peut-on lire dans une publication de www.lemonde.fr .
Même si la plupart des places de vente de médicaments sans avis d’un personnel de la santé sont fermées, la population se tourne désormais vers les officines pour se fait servir.
Mais le rôle du pharmacien n’étant pas de prescrire les médicaments, il conseille les médicaments qui sont en vente libre et ils sont autorisées à faire la substitution de certains médicaments qui sont sur une ordonnance mais de commun accord avec le médecin au cas où ce médicament serait en rupture ou le patient aura des difficultés à acheter ce médicament. Les médicaments qui sont entre autres vendus dans les pharmacies sans avis médical sont des vitamines A, B, C, E, D, des antidouleurs, des médocs contre la grippe, le paludisme, etc a expliqué le Dr Charles Aïnadou, pharmacien et ancien président de l’ordre des pharmaciens.