Pop Smoke

POP SMOKE : un album pour la POP’stérité

By on 09/07/2020 0 3209 Views

Il est mort par balles à 20 ans.  Le 19 Février 2020, Pop Smoke est tué à Hollywood lors d’un cambriolage qui aurait mal tourné. Il était de passage dans la ville et séjournait dans une villa louée pour l’ocasion. Cette nouvelle a attristé tous les fans du rappeur et tous les observateurs de la nouvelle vague du rap made in Brooklyn. Dans la lignée des grands rappeurs issus de cette ville,  Pop a avait repris tous  les codes du « gangsta » rap à son compte avec une sorte de brutalité romantique qui lui est propre. Un rappeur de New-York n’avait plus suscité autant d’engouement et la déferlante « Woo » (son gimmick favori) devait s’abattre en 2020 avec son premier album. Sa mort est à l’image de sa voix : froide, rageante et un brin romantique. Elle nous questionne aussi sur la violence aux US et le mode de vie dangereux de ces rappeurs qui en font l’apologie. Désastreusement c’est ce  même mode de vie qui  les rattrape et nous prive de leurs talents et de leur musique.

La mort

Bashar Barakah Jackson avait de l’ambition, il voulait changer le « game », le marquer par son style. Il l’avait à maintes reprises dit dans plusieurs de ses interviews.  Il faut dire que Pop Smoke disposait d’une street crédibilité assez forte. Affilié au gang des 823G-STONE Crips depuis son adolescence avec lesquels il apparaît dans plusieurs clips, le garçon avait eu mailles à partir avec plusieurs membres des gans rivaux  (une vidéo de lui à 13 ans se faisant agresser tourne d’ailleurs sur le net). Adoubé par 50Cent comme son héritier musical et doté d’une voix résultant d »un croisement entre DMX et le patron du G-Unit, Pop Smoke disposait d’une excellente réputation quant à son talent auprès des dénicheurs de talents de hip-hop.  Très peu d’artistes arrivent avec une validation sans avoir sorti d’album majeur.  POP apparaissait intouchable dans cette nouvelle génération et son décès a créée autour de son label VICTOR VICTOR une forte attente pour son album posthume.

L’album

Initialement prévu pour le 12 juin, l’album est finalement sorti le 3 juillet. La sortie a été reportée à cause des manifestations qui ont eu lieu aux US. Le nom de l’album est « Shoot for the stars, Aim for the Moon» littéralement : viser la lune pour atterrir dans les étoiles. Ce titre est inspiré de la fondation « Shoot for the stars », une organisation à but non lucratif qui aide les enfants démunis. Elle avait été créée par le rappeur lorsqu’il était encore en vie.

Son mentor 50Cent a été désigné comme directeur exécutif.  Très fort sur la drill et les prod trap, l’artiste développait sa panoplie.  Peu avant sa mort, le rappeur expérimentait les sonorités plus Rn’b et l’album qui en résulte est un chef d’ œuvre artistique. D’abord la direction artistique est réfléchie et variée : plusieurs univers musicaux ont été explorés et Pop excelle dans chacun de ses styles.  Rn’b , Trap, drill l’arsenal du bonhomme est impressionnant. Parfois sombres ou romantiques les 18 pistes sont un enchaînement de claques avec une liste d’invités prestigieux : Quavo, 50Cent, Future, Swae lee, Tyga, Lil Baby, DaBaby …

Mentions spéciales sur les 18 titres

  1. Gangstas:  on dirait une production de Dr Dre et de Scott Storch pour le 50Cent de la grande époque. Les notes de piano et les caisses nous offrent un classique New-yorkais.
  2. Make it train et l’outro Tunnel vision des classiques drill : des concentrés de noirceur et de fougue. Le genre de sons qui augmente votre taux de testostérone !
  3. Snitchin : la connexion ATL et NY sur une prod trap : Quavo y va de son refrain efficace et Future a tout donné sur son couplet comme le tonton qui veut montrer aux jeunes qu’il n’est pas encore fini.
  4. For The night : une ballade romantique façon P. Smoke (…) DaBaby et Lil Baby font le job avec des couplets chantés.
  5. Sur Mood Swing , Pop Smoke et LilTjay nous montre comment faire des déclarations d’amour à celle/celui qu’on aime ( n’est-ce pas !)
  6. Something special : avec un sample de Into You de Tamia sorti en 1998 ou le rappel pour la génération 90s.

L’héritage

Au-delà la polémique sur la couverture de l’album,  le label de Steven Victor est à féliciter car l’équipe de travail est restée fidèles à l’image originelle du Pop Smoke . Ils y ont rajouté une touche de finesse et l’ont fait progresser sur des sons plus chantés. Salué par la critique, la dextérité du rappeur a clairement été démontrée. J’ai dit plus haut que Pop Smoke a rappé la rue violente et l’a vanté dans ses sons. Son assassinat représente le paradoxe du rappeur au mythe; ce même mythe qui exige une forte proximité avec la rue et le talent pour conter. Le hic est que la mort n’est jamais loin de ce mode de vie. Ces rappeurs vivent à fond la rue qui finit par les tuer : ils ont  l’art de vivre leurs vies et de mourir de ce qu’ils ont vécu. Apôtre de la drill, Pop Smoke, par son album, a déjà marqué le rap américain. Sa voix unique restera pour l’éternité, reposes en paix Woo !

MiguelKpakpo

Epris de sujets sociétaux et politiques, j'ai été moulé dans l'univers des années 90 et 2000. Éclectique, amateur de politique et de rap, je connais aussi bien les classiques de Koba La D et que ceux de Karl Marx! “Les pensées de la classe dominante sont aussi, à toutes les époques, les pensées dominantes.”