La diaspora : l’autre pilier de l’économie africaine
Construction de routes, d’infrastructures scolaires, transfert d’argent, etc. sont autant d’actions que posent chaque jour la diaspora africaine en Afrique. Si pour la plupart, les conditions de départ de l’Afrique ne sont pas faciles, ils arrivent à très vite contribuer à l’amélioration des conditions de vies de leurs proches dès qu’ils stabilisent un peu leurs revenus. La raison pour eux est simple : il faut penser au développement du continent et au bien-être de la famille.
Près de 200 millions : c’est le nombre que fait la diaspora africaine dans le monde selon l’Union Africaine. Pour la Commission de l’UA, la diaspora africaine se définit comme l’ensemble des personnes d’origine africaine vivant à l’étranger, c’est-à-dire hors du continent africain. Cette définition englobe tous les individus d’origine africaine, et ce, quelles que soient leur nationalité et leur citoyenneté. Depuis plusieurs années, la diaspora est considérée comme la sixième région d’Afrique. De ce fait, selon Africatech « la diaspora africaine représente 40 millions de personnes en Amérique du Nord, 112,65 millions en Amérique du Sud, 3,51 millions en Europe et 13,56 millions aux Caraïbes. La contribution de la diaspora africaine au développement se caractérise depuis des décennies par l’envoi d’argent ». Le site continue pour rappeler qu’il est important de retenir que ces chiffres concernent la diaspora africaine selon la définition de l’Union africaine, à savoir : les personnes d’origine africaine vivant sur un continent autre que celui africain et contribuant au développement de l’Afrique. Cette définition englobe uniquement les individus d’origine africaine ayant été identifiés comme des citoyens à l’origine de transferts financiers via les circuits de transactions formels (Western Union, Moneygram, etc.).
Pour d’autres experts, la diaspora africaine, est une population qui résulte d’une part de la déportation de personnes d’Afrique subsaharienne à l’époque des traites négrières et de leurs descendants à travers le monde, et du phénomène d’émigration d’autre part. Les populations issues de la traite occidentale habitent plus particulièrement sur le continent américain dans les Caraïbes, aux Guyanes : Guyane et Guyana, au Suriname, aux États-Unis, au Canada, en Amérique centrale et en Amérique du Sud (dans tous les pays sauf en Argentine). Ils sont minoritaires partout sauf aux Antilles, où la population résulte du métissage entre Européens et de subsahariens. Ils habitent aussi dans l’océan Indien dans les îles Seychelles, La Réunion et à Maurice. Ils sont minoritaires dans cette dernière île. Dans les îles du Cap-Vert24 et à Sao Tomé-et-Principe25, les Portugais ont aussi importé des esclaves qui y constituent la population majoritaire de ces deux pays aujourd’hui. Ce qui rend plus important les chiffres de la diaspora africaine. Et donc Africatech statuera pour dire que la diaspora africaine est, en réalité beaucoup plus importante, dès l’instant où la notion de diaspora concerne toutes les personnes d’origine africaine vivant à l’étranger : 29 millions de personnes aux Caraïbes, environ 112 millions en Amérique du Sud, 43 millions en Amérique du Nord, 1,5 millions en Amérique centrale, 8 millions en Europe, 400 000 milles en Asie et 260 000 en Océanie.
Un apport financier non négligeable
Dès qu’ils stabilisent leurs revenus, ils sont les 1ers contributeurs au bien-être de leurs proches restés sur le continent. D’autres créent des emplois et engagent la main d’œuvre locale. C’est le cas par exemple de Vincent M. Styliste, il a quitté son pays le Togo depuis 10 ans. Et cela fait 5ans déjà qu’après un tour au pays, il a mis en place des ateliers de couture où il a recruté plus d’une cinquantaine de mains d’œuvre. Le salaire minimal dans ces ateliers est au-dessus du Smig assure-t-il fièrement. D’autres comme lui investissent dans le numérique, les transports et logistiques, le commerce, etc.
Yacine Bio Tchané, expert en Economie au Bénin, nous confirme que ceux qui partent de l’Afrique investissent beaucoup plus dans leur pays d’origine. « Les migrants rapatrient de l’argent dans leurs pays. Ils s’organisent en association et construisent des routes, des centres de loisirs etc. Il y a des quartiers construits par des migrants au Sénégal » dit-t-elle. Un argumentaire qu’utilise aussi le site rfi.fr. Dans un article sur l’immigration et ses effets positifs sur l’économie, le site écrit que « la migration est bénéfique pour le commerce et l’investissement puisque 3 % environ de l’investissement « étranger » en Afrique est lié aux expatriés ». Sabine Cessou, l’auteur de l’article ajoutera aussi que « les transferts d’argent représentent près de 5 % du PIB ouest-africain selon la Banque mondiale et plus de 10 % du PIB de nombreux pays (Sénégal, Cap-Vert, Liberia et Gambie, entre autres) ».
De l’autre côté, le magazine Afrique Expansion souligne que bien qu’ayant physiquement quitté le pays natal et le continent, la diaspora a maintenu un lien fort avec l’Afrique à travers divers mécanismes. De manière générale, les experts mettent en évidence trois grands secteurs dans lesquels s’opère l’interaction diaspora-pays d’origine : le secteur du développement local; le secteur des affaires ; le secteur de la science et de la technologie. Les envois de fonds des diasporas vers les pays d’Afrique sub-saharienne devraient atteindre 49 milliards de dollars en 2019, selon une note de la Banque mondiale (BM). Des flux en hausse de 50% depuis 2010. Sans parler des transferts informels, par définition plus difficiles à mesurer, mais qui pourrait représenter entre 35% et 75% des flux comptabilisés. Selon Dilip Ratha, l’auteur de ce rapport, « les envois de fonds sont en passe de devenir la principale source de financement extérieur des pays en développement« . France Info détaille que « l’Egypte est le pays africain qui reçoit les plus importants transferts financiers de sa diaspora (28,9 milliards de dollars), suivi par le Nigeria (24,3 milliards de dollars). En pourcentage du PIB, ce sont les Comores qui arrivent en tête, devant la Gambie, le Lesotho, le Cap-Vert, le Liberia, le Zimbabwe, le Sénégal, le Togo, le Ghana et le Nigeria ».
Des chiffres qui connaitront certainement une hausse plus importante encore d’ici quelques années. Mais face à l’ampleur de l’immigration sous-régional, l’on pourrait se demander si les transferts d’argent entre les pays africains ne connaitront pas un boom.