Travail des enfants au Togo : Enfance volée ou perdue ?
Le travail des enfants est un phénomène à dimension mondiale qui prend de l’ampleur en Afrique. Malgré l’arsenal juridique considérable et de nombreuses actions importantes menées par les gouvernements et les institutions impliquées dans la lutte contre le travail des enfants, le phénomène continue de se faire observer dans plusieurs pays de la sous-région Ouest-Africaine comme le Togo.
Frontière Togo-Bénin, le soleil ardent de 15heures, ne constitue pas une barrière pour la foule qui nous entoure. Des voyageurs pressés de remplir leurs formalités pour ne pas perdre de vue leur taxi de l’autre côté de la frontière, tout en étant interpellé par des vendeurs ambulants, des douaniers qui surveillent les véhicules qui traversent, l’ambiance est celle des autres jours à cette frontière. Mais, Entre vendeurs, acheteurs et voyageurs, s’impose la présence massive des enfants qu’on pourrait classer dans la catégorie d’âge de 5 à 14 ou 16 ans au plus. Les uns courent après les voyageurs qui traversent la frontière à pieds ou sautent de bus en bus, afin de vendre des papiers mouchoirs, des puces téléphoniques, des biscuits et des oranges. Les autres se font charger sur la tête les bagages des voyageurs qui entrent au Togo ou au Bénin, des arrêts de bus aux postes de contrôle et à l’inverse, contre une somme selon la quantité et le poids du bagage.
Des scènes révoltantes qui interpellent mais face auxquelles, il est difficile de prendre des images à la frontière, impossible ou si non presque d’interroger les enfants qui sont tous occupés à la recherche du gain. Sauf en situation d’achat où, Akwa une petite fille d’environ 8 ans avec un visage trempé de sueur, un front brillant de soleil, des habits bien sales, des pieds poussiéreux enfouillent dans des sandales en état hors d’usage et des papiers mouchoirs à vendre dans la main, nous confesse « qu’elle a laissé l’école en classe de CE2 l’année dernière, pour aider sa maman devenue veuve ». A peine a t- elle jeté le dernier mot, qu’elle a déjà disparu dans la foule en courant. Pourtant c’est un jeudi, jour ouvrable où les enfants sont supposés être à l’école.
Que dit de l’état des lieux du travail des enfants au Togo ?
C’est une situation qui progresse. Répond Théodore AGBOVI, éducateur alphabétiseur. Il décrit que « de plus en plus, la plupart des enfants travaillent pour contribuer à la charge de leur famille et ils sont en majorité des filles placées ou des revendeuses postées. D’autres sont ambulantes et vendent à la criée, pure water, ignames, gâteaux, fromages, oranges, etc. » Comme Akwa, des centaines d’enfants togolais se font voler leur enfance dans les marchés, sur les chantiers de constructions ou encore à la frontière. « La raison générale peut être la pauvreté, mais il y a aussi la non planification des naissances d’où le nombre élevé d’enfants dans les couples ; la polygamie ; les divorces laissant certains enfants à eux-mêmes ; l’ignorance des parents face aux promesses fallacieuses des demandeurs et aussi le chômage galopant » a expliqué Théodore AGBOVI.
Des actions qui se révèlent insuffisantes ?
De nombreuses actions sont menées par le gouvernement togolais et les institutions impliquées dans cette lutte. Il existe également de nombreux services sociaux qui militent pour le bien-être de l’enfant à travers des activités de prévention ; d’identification ; d’accompagnement éducatif, social, sanitaire, psychologique et de réinsertion soit scolaire ou professionnelle des enfants. Mais la situation persiste. Pour l’éducateur alphabétiseur, il existe encore des issues pour aller vers la protection effective des enfants contre le travail. « Il faut une conscientisation collective qui met l’enfant au centre de toute préoccupation, qui lui offre les outils et les moyens de devenir un adulte responsable. Sans oublier une réduction manifeste de la pauvreté qui se trouve être la base des carences éducatives et l’application effective de la loi relative au travail des enfants » a-t-il ajouté. Le travail des enfants au Togo comme en Afrique est une situation qui tarde à prendre fin, ceci « tant que les gens vont continuer à trainer derrière eux la pauvreté et seront incapable de planifier les naissances » va conclure Théodore AGBOVI.