Le Carnaval d’Haïti, la fête identitaire du Bonheur !
Malgré la peur de catastrophes naturelles, la pauvreté qui sévit, le peuple Haïtien trouve chaque année le moyen de vivre des instants de bonheur. Ceci grâce au Carnaval d’Haïti qui se tient chaque année depuis plus de deux mille ans.
Du 11 au 13 février 2018, Haïti a célébré l’édition 2018 de son carnaval. « Ayiti jan l dwé ye » comme pour dire « Haïti voici comment tu dois être. » en « créole » a été le thème de cette édition qui, a, une fois encore prouvé que le Carnaval reste la plus grande manifestation culturelle du pays.
Une fête importée devenue identitaire
« Le Carnaval, c’est le meilleur moyen de vivre et de vendre la culture haïtienne » nous confie Mirloude Alcin, jeune médecin haïtienne. Cette manifestation connue dans d’autres pays est devenue au fil des années pour nombre d’haïtienne, une fête qui les définit. Dans « Lettres de Cuba » numéro 10, de 2014, Jean Maxius Bernard explique que le Carnaval est une fête d’origine païenne importée d’Europe. « Au moyen âge, le Carnaval était célébré comme les dernières réjouissances mettant fin aux festivités du nouvel an avant d’entrer dans la période de pénitence appelée carême » écrit-il. Ce serait selon l’histoire importé de l’Amérique de par la conquête espagnole au 16ème siècle. C’est devenu un évènement qui permet de parodier la vie quotidienne tout en se défoulant. Cette fête adoptée très tôt par le peuple haïtien, a fini par être accepté par le Gouvernement qui se charge de son organisation et en a fait une fête nationale. Un comité d’organisation est mise en place donc pour assurer une meilleure organisation mais aussi surtout pour contrôler le plus possible la fête et éviter les dérives.
Jean Maxius Bernard explique dans son article qu’à ses débuts, le Carnaval a été un simple évènement frénétique. « Mais avec le temps, il se transforme en parodie mettant en scène la vie sociale. » informe t’il.
Une fête sans Tabou
Cette vie sociale mise en scène ne laisse place à aucun interdit. En effet, considérée comme une fête païenne, le Carnaval ne voit pas la participation des chrétiens notamment Protestants, Méthodistes, Pentecôtistes etc. Mirloude Alcin explique que durant les festivités, les dirigeants de ces différentes religions organisent des camps de prière, de vacances pour éloigner leurs fidèles.
Mieux durant cette célébration, il n’y a aucun tabou. Tout ce qu’on considère dans la société comme immoral est célébré ces jours. « Les gens peuvent faire ce qu’ils veulent sans crainte d’être jugés ou arrêtés. Les ébats sexuels sont permis que tu sois marié, en couple ou fiancé. Les gens peuvent sortir nus juste avec de la peinture sur le corps. Durant le carnaval, il n’y a pas d’atteinte à la pudeur » nous renseigne la jeune médecin. C’est donc pour les haïtiens, une façon de s’exprimer, d’exprimer tout ce qui passe dans la société que ça soit sur le plan religieux, sanitaire, touristique.
Mais l’autre objectif du Carnaval en dehors de cette libre expression sans tabou, c’est la valorisation de la culture, de la tradition, des us et coutumes de ce pays surnommé « la perle des Antilles. »
Des jours heureux de manifestations
L’une des particularités du Carnaval est qu’il n’a pas une date précise. Il se fait durant trois jours mais toujours dans le mois de février. Il débute le dimanche gras et prend fin le mardi gras. Mais avant les dates officielles, le peuple commence déjà sa fête en janvier juste après la « fête des rois » qui est une fête chrétienne permettant de célébrer l’arrivée des rois marges.
Mirloude Alcin informe que chaque dimanche après la fête des rois, et avant le dimanche gras, des groupes musicaux, notamment « les bandes à pied » sortent dans la rue avec des instruments de musique traditionnels et jouent à travers la ville. L’accent ici est mis sur les instruments, chants et danses joués. Il ne s’agit que de musiques traditionnelles. Une façon de divertir la foule tout en valorisant les rythmes ancestraux. Ces célébrations pré-carnavalesques du dimanche sont des initiatives personnelles n’incluant pas le comité d’organisation.
Le Carnaval proprement dit qui démarre le dimanche gras, comporte deux parties et débute l’après-midi. Il y a en première partie, le défilé des groupes et organisations culturels qui font des représentations artistiques à travers chants et danses. La deuxième partie, c’est le défilé des chars allégorique. Chaque ministère est tenu d’avoir son char pour mieux renseigner sur ce que fait le ministère mais aussi pour faire des sensibilisations. Toutefois il y a aussi des chars musicaux qui diffusent des musiques très entrainantes.
Des stands sous forme de balcon sont mis en place par le comité pour permettre aux gens de se mettre en hauteur et vivre plus tranquillement les défilés qui se font sur un parcours prédéfinit. Le carnaval, c’est aussi un thème chaque année qui inspire toutes les manifestations.
Le revers de la médaille
Le site haïtien « alterpress » informe qu’en 2015, le carnaval a été endeuillé par la mort de 17 personnes et d’une quarantaine de blessés. L’accident d’un char sur le parcours serait à l’origine du drame.
Mais en dehors de ce fait et vu l’aspect sans tabou du festival, des manifestants en profitent pour faire du mal. Mirloude raconte « de nos jours, malgré la présence des forces de l’ordre, des gens se poignardent, se blessent. Ils profitent du carnaval pour se régler des comptes jusqu’à commettre des meurtres parfois. ».
Mais rien ne diminue l’ardeur des haïtiens, et des milliers de touristes venus de par le monde venus vivre ces instants de bonheur. « Le Carnaval, c’est la plus belle chose qui existe en Haïti. C’est la fête, l’euphorie, la joie, on fait tout ce qu’on veut. » s’extasie Mirloude Alcin. C’est une expérience à vivre au moins une fois dans sa vie en tant qu’haïtienne nous dit-elle, impatiente de vivre celui de l’année prochaine.