Succession des épidémies : une résultante de notre mode de vie actuelle
Depuis plusieurs décennies, on observe une augmentation dans la fréquence d’apparition des maladies infectieuses à potentiel épidémique dans le monde. Selon plusieurs experts, l’explication d’une telle explosion est reliée à la promiscuité entre les humains et la nature. Ainsi, l’interaction qui existe entre les hommes et leur environnement peut avoir des conséquences dramatiques aussi bien sur la santé de la planète que sur celle de l’humanité.
Les 40 dernières années ont vu le nombre d’épidémies flambé à travers le monde. En 1980, les chercheurs scientifiques détectent pour la première fois le VIH responsable du SIDA. Depuis, cette maladie infectieuse s’est propagé dans de nombreux pays et est considérée dès lors comme l’une des plus importantes pandémies de l’histoire de l’humanité. Si le virus Ebola est apparu en 1976, c’est en 2014 qu’il touche l’Afrique de l’Ouest avec une ampleur jusque-là inédite (soit un total d’environ 11.310 morts). Le SRAS, la grippe aviaire H7N9, la grippe porcine H1N1, le MERS (Middle East Respiratory Syndrome), le chikungunya, la dengue, le Nipah, le Zika et la fièvre Lassa sont autant de maladies épidémiques qui sont apparus ces dernières années. Plus récemment, c’est le nouveau coronavirus (Covid-19) qui fait des ravages dans le monde et dont le nombre total de morts s’élève à 286.336 à ce jour.
Toutes ces différentes maladies infectieuses émergentes (MIE), ont pour origine des virus portés par des animaux sauvages ou domestiques. On parle alors de zoonose. Selon les chiffres avancés par la banque mondiale, « 60 % des MIE dans le monde sont des zoonoses, et au sein de ces dernières, la grande majorité (plus de 70 %) provient des espèces sauvages ». Cette assertion est confirmée par une étude menée par des chercheurs américains et réalisée avant la crise épidémique actuelle. Rapportée par le télégramme, cette recherche désigne les primates, les rongeurs et les chauves-souris comme les porteurs d’une grande partie des virus qui infectent l’être humain (soit 75,8 %). Outre ces espèces, les animaux domestiques sont également désignés comme étant des hôtes de 50 % des maladies zoonotiques identifiées par l’étude. Mais quel est le rôle joué par l’Homme dans la survenue de ces épidémies et comment les anticiper à l’avenir ?
L’action humaine mise en cause
Selon plusieurs scientifiques, si les épidémies s’enchaînent depuis quelques années, la responsabilité incombe en grande partie aux humains. Certes, les zoonoses existent depuis fort longtemps. Mais ce sont les activités des hommes qui constituent l’élément déclencheur dans leur augmentation. L’accroissement de la population humaine conduit à la dégradation des écosystèmes naturels et par ricochet, à la destruction de la diversité biologique. En effet, les activités anthropiques telles que l’artificialisation des terres et la déforestation ont des conséquences néfastes sur les écosystèmes. Elles provoquent entre autres, le déplacement des animaux sauvages en quête de nourriture vers des zones habitées. Ce rapprochement avec les humains facilite l’échange des virus dont ils sont porteurs. Les animaux domestiques et ceux issus de l’élevage (intensif surtout) ont aussi leur part dans la propagation des virus, vu la proximité qui existe entre eux et les êtres humains. D’autre part, le réchauffement climatique est un facteur qui favorise l’émergence des maladies infectieuses puisqu’il pousse les espèces animales susceptibles d’héberger des virus vers d’autres aires de répartition. À tout ceci, s’ajoute le commerce des animaux sauvages. Ce trafic qu’il soit légal ou illicite, amplifie considérablement le risque de contagion à travers le simple contact des hommes et des espèces ainsi braconnées. C’est le cas du coronavirus né sur un marché de Wuhan. Cet état de choses, David Quammen, écrivain américain et auteur de Spillover : Animal Infection and the Next Pandémique publié dans le New York Times le décrit si bien en écrivant « Nous envahissons les forêts tropicales et autres paysages sauvages, qui abritent tant d’espèces animales et végétales et au sein de ces créatures, tant de virus inconnus. Nous coupons les arbres ; nous tuons les animaux ou les mettons en cage et les envoyons sur les marchés. Nous perturbons les écosystèmes et nous débarrassons les virus de leurs hôtes naturels. Lorsque cela se produit, ils ont besoin d’un nouvel hôte. Souvent, c’est nous qui sommes cet hôte ».
De nouvelles résolutions
Anticiper l’apparition de futures épidémies suppose un changement de comportement de la part des humains que nous sommes. Selon les propos de Brian Bird, chercheur virologue à l’Université de Californie Davis School of Veterinary Medicine One Health Institute et rapportés par UP’ Magazine, nous devons nous préparer à l’apparition de nouvelles épidémies dans le monde. « Nous ne pouvons pas prévoir d’où viendra la prochaine pandémie, c’est pourquoi nous avons besoin de plans d’atténuation qui tiennent compte des pires scénarios possibles. La seule chose qui soit certaine, c’est que la prochaine viendra certainement » déclare-t-il. Par ailleurs, pour d’autres scientifiques, il urge d’attaquer le problème à la racine en traitant les causes plutôt que les conséquences. Pour cela, il sera nécessaire de repenser la relation qu’entretient l’homme avec son environnement à travers une meilleure conservation de la biodiversité restante et une réduction de la pression effectuée sur les écosystèmes naturels. Nous devons donc agir le plus rapidement possible afin de prévenir les prochaines crises épidémiques.