Albinos, et Alors !?
Depuis 2015, le monde entier fête chaque 13 juin, la Journée Internationale de Sensibilisation à l’Albinisme. Une journée instaurée par l’Organisation des Nations Unies (ONU) pour sensibiliser le grand public aux difficultés rencontrées par les albinos dans leur vie quotidienne et lutter contre le rejet qu’ils peuvent parfois subir dans certaines sociétés. Cependant, la situation des albinos en Afrique reste toujours très préoccupante.
Une vie stigmatisée !
« Pour mon premier jour de rentrée des classes au Bénin en tant qu’instituteur, mes apprenants étaient contents d’avoir un maitre blanc », nous raconte avec un sourire en coin, Arsène, instituteur Congolais, venu se « réfugier » depuis 5ans dans un quartier populaire « d’Abomey-Calavi » au Bénin. Habitant dans ce quartier depuis son arrivée, il nous explique qu’il ne passe pas inaperçu. En tant qu’albinos, il est même utilisé pour indiquer des maisons voisines à la sienne. « Un jour, j’ai surpris une dame indiquée à un « Zémidjan », une boutique en disant « la boutique située dans la rue de l’instituteur blanc noir » dit-il. Mais loin de me frustrer, je préfère ces genres de situation, qui me permettent quand même de vivre tranquillement au Bénin où les albinos ne sont pas trop inquiétés. Chez nous au Congo, « nous vivons la peur au ventre, pourtant nous sommes justes des humains aussi ».
En effet au Congo et dans plusieurs autres pays d’Afrique, les albinos sont considérés comme des sorciers ou comme des personnes porteuses de chance. Ils sont donc sujets à des assassinats pour des sacrifices rituels.
L’albinisme oculo cutané est dû à un défaut de production « du pigment mélanique » par « les mélanocytes », à cause d’une mutation génétique. C’est une maladie génétique qui touche la mélanine, ce gène permettant de pigmenter la peau. Lorsqu’il est absent, la peau est blanche, les cheveux sont blonds et des problèmes oculaires peuvent parfois amener à l’aveuglement. Le gêne peut venir des parents directs ou juste d’un membre de la famille. C’est le cas par exemple de « Fatu Dolleh« , Albinos, Animatrice, Chroniqueuse Guinnéenne vivant au Bénin, qui explique qu’ « elle a hérité des gènes de l’albinisme des ancêtres de ses deux parents ». Un héritage qui lui a été un peu difficile à accepter et à porter.
En effet, si au Bénin, les « Agué-yovos » comme on les appelle en langue « Fon », ne connaissent pas des assassinats comme dans d’autres pays, ils subissent quand même leurs lots de stigmatisation et de difficultés. Fatu explique qu’avec son problème visuel dû à son albinisme, elle avait des difficultés à voir au tableau durant son cursus scolaire et universitaire. « J’étais obligée de me déplacer devant, ou de demander à des camarades de me prêter leurs cahiers après les cours pour recopier. Ce qui m’amenait à sacrifier mes heures de récréation, de repos mais aussi de loisirs pour rester en classe et copier ». Une situation qu’elle trouvait quand même gênante. Elle continue pour expliquer que le plus difficile était son intégration. « Des gens me touchaient pour savoir si j’étais réelle, d’autres me rejetaient parce que j’étais différente ». Une situation qui faisait d’elle une personne complexée, renfermée, pas fière d’elle, et qui pressait ses parents de questions sur sa différence de peau.
Une situation préoccupante !
L’albinisme peut toucher les populations caucasiennes mais il est plus fréquent en Afrique sur les peaux noires. En Tanzanie par exemple, les études estiment qu’un habitant sur 1400, est albinos. Au Mozambique, on parle d’au moins 20 à 30 000 albinos sur une population de 26 millions d’habitants.
Une situation qui expose les personnes atteintes de cette maladie. Ils sont tués pour servir à des crimes rituels. Selon la superstition, les albinos sont des personnes chanceuses. Il est dit que leurs organes seraient porteurs de pouvoirs magiques. En Tanzanie, plus d’une centaine d’albinos ont été tués depuis 2000.
Au Mozambique en 2017, un adolescent albinos a été retrouvé tuer et mutiler au niveau de ses bras, de ses jambes et de son cerveau. Un cas qui n’est pas isolé.
Albinos et fière!
« Moi aujourd’hui, je me sens comme une star, je me sens bien dans ma peau et je suis fière de moi » s’exclame toute rayonnante, l’animatrice Fatu Dolleh. Première albinos, présentatrice Télé à la « Télévision Carrefour « au Bénin, la jeune femme, de mère Congolaise, explique qu’elle fait aujourd’hui de son différence un atout. « Aujourd’hui je dis merci à Dieu parce qu’il ne pouvait pas mieux me créer. Cette différence, j’en suis très fière, je me sens reine »
Malgré les stigmatisations auxquelles ils font face, les albinos essaient tant bien que mal de faire gagner leurs causes à travers la mise en place d’organisations, de séances de sensibilisation mais aussi à travers l’histoire d’albinos célèbres.
Et l’exemple le plus en vue reste le célèbre Chanteur albinos, « Salif Keita ». D’origine malienne, gagnant d’un « Kora Awards », Salif Keita malgré son albinisme et le rejet de sa propre famille, a su faire de sa maladie un atout. Pour les albinos, il sortira en 1995, son album « Folon » dédié aux enfants albinos pour lesquels il a créé une association.
Des actions qui laissent croire à l’amélioration de la vie des albinos, espérons-le !